mercredi 8 août 2007

Un capital d’expériences et de savoir-faire
Penser et actualiser la retraite citoyenne

Jean CARETTE


La retraite s’ouvre à nous comme un défi et une course à obstacles. 25 à 30 ans de vie nous sont crédités, avec autant de rêves que de temps libres, autant de risques que d’illusions. Certains, de plus en plus nombreux, vont retourner sur le marché du travail, à la fois pour s’occuper et se valoriser, tout en y trouvant de quoi maintenir leur pouvoir d’achat et leur train de vie. D’autres vont se laisser séduire par les loisirs et la consommation, d’autres encore par une attention plus forte à la vie affective. Quelques-uns vont retrouver le chemin de l’école ou de l’université, pour y trouver nourritures intellectuelles, rencontres utiles et valeur sociale.

Pour ma part, j’appelle à une retraite citoyenne: participer aux décisions qui nous concernent, en tant qu’aînés, mais surtout, au-delà de l’âge, en tant que citoyens actifs et électeurs; défendre les héritages sociaux et culturels pour les léguer intacts aux âges qui nous suivent, ou à défaut, prendre les moyens collectifs de parachever nos révolutions tranquilles; concourir à l’élaboration d’un nouveau «contrat naturel» préservateur de nos environnements et garantissant à l’air et à l’eau le statut de biens communs; défendre les droits de tous et les mettre à jour, plutôt que d’étendre les privilèges de l’âge ou d’une génération plus chanceuse que les autres; bâtir des milieux de vie plus conviviaux et plus heureux, à force de discriminations positives et de différences acceptées; travailler, oui, travailler à étendre le champ de la démocratie.

Les aînés ont soif de connaissances nouvelles, mais ils sont aussi de plus en plus nombreux à vouloir faire reconnaître leur expérience accumulée et la valeur sociale de leurs actions et de leurs droits.



Les spécialistes en sciences politiques et en marketing électoral feraient bien d’observer les changements en cours chez les jeunes retraités: plus scolarisés, plus habitués à des stratégies collectives de changement, plus conscients de leurs droits et plus aptes à les défendre et à les promouvoir, ils sont 1000 à parvenir à la retraite chaque semaine, sans compter tous ceux qui tombent en invalidité et attendent l’accession à leurs droits et prestations de retraite.
Ils seront de plus en plus la principale force électorale et pourront la mettre au service d’enjeux communs et de priorités qu’ils sauront imposer à leurs élus. Refuser de prendre en compte ces nouvelles réalités, c’est risquer d’accroître les corporatismes et les replis individualistes qu’on déplore déjà, au détriment du développement social général.

Une question de simple solidarité avec tous les âges de la vie.



Aujourd’hui, les aînés représentent et détiennent un capital patrimonial d’expériences et de savoir-faire qui doit être accueilli et valorisé à l’occasion d’un réel partenariat, à négocier et à respecter dans l’intérêt des deux parties impliquées. Il est à souhaiter, par exemple, que nos universités soient un jour concrètement imputables de cette capacité d’accueil et de reconnaissance, au-delà des déclarations d’intention le plus souvent marquées au coin de l’intérêt à court terme ou du paternalisme le plus condescendant. Les aînés ont soif de connaissances nouvelles, mais ils sont aussi de plus en plus nombreux à vouloir faire reconnaître leur expérience accumulée et la valeur sociale de leurs actions et de leurs droits.

Les aînés ne sont ni une charge ni un frein au développement collectif. Ayant «déjà donné», ou payé d’avance, ayant épargné ou investi, et pas seulement sur le plan financier, désireux par-dessus tout de rester des acteurs sociaux utiles, leur cote de crédit est largement positive, ce qui n’est pas encore le cas des groupes d’âge plus jeunes. À condition que leurs divers regroupements proposent, et même imposent au besoin, une image et une présence socialement actives et valorisées d’eux-mêmes.

Or comment mieux y parvenir, de l’autre côté du travail salarié, sinon à partir des multiples formes vécues d’une action communautaire et d’un volontariat civique généralisé ? Une question de simple solidarité avec tous les âges de la vie et de sens renouvelé à donner à notre parcours personnel des âges de la vie...


Cet article est paru dans l'édition Printemps 2007 du Jumelé.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

beaucoup appris