jeudi 11 octobre 2007

Stratégie Carrière à Trois-Rivières
Rampe de lancement vers un emploi

Jérôme MARSAIS

« Je ne suis pour toi qu’un renard semblable à cent mille renards.
Mais si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de l’autre. »
Le petit Prince- A. Saint-Exupéry

Stratégie Carrière est un organisme à but non lucratif créé en 1998 et dont la mission première est l’employabilité. Une équipe pluridisciplinaire de conseillers d’orientation, de conseillères en emploi, d’une psychologue et d’agents de liaison, mise sur l’intervention complémentaire de chaque employé pour accompagner de façon appropriée et personnalisée nos clients en recherche d’emploi.

En 2004, nous avons ouvert notre expertise aux immigrants avec un programme de régionalisation pour attirer ces derniers en Mauricie. Peu de temps après, nous offrions également nos services aux immigrants déjà présents sur le territoire, pour la plupart des réfugiés publics.

Notre clientèle est donc diversifiée en termes de culture, de statut, de profil professionnel… d’attentes surtout de leur nouvelle vie québécoise. Par conséquent, l’approche des conseillères en emploi de Stratégie Carrière devient tout aussi diversifiée. Leurs interventions, basées sur des rencontres individuelles, permettent d’adapter le discours, le cheminement dans la recherche d’emploi, et, enfin, l’accès à l’emploi.

Lorsqu’on parle d’employabilité des immigrants de la région, il faut être pragmatique et savoir qu’un success story de placement en emploi provient toujours d’une alchimie dont les ingrédients reliés à des facteurs « entreprises », « sociaux » et « humains » sont multiples. Le mécanisme est subtil pour concrétiser l’obtention d’un poste. On s’imagine donc facilement les difficultés que peut rencontrer un immigrant livré à lui-même face à sa recherche de travail.

Dans cette optique, il nous est apparu primordial, dès l’origine du projet, d’associer aux conseillères en emploi des agents de liaison pour que les techniques de recherche d’emploi soient appliquées de façon adaptée et immédiate afin de ne pas briser la dynamique de mise en route.

J’occupe depuis 2004 cette fonction d’agent de liaison. À la croisée des chemins entre le monde social et le monde économique, il me faut savoir naviguer dans ces deux sphères, tantôt à titre de « manager », tantôt de « médiateur », tantôt de « traducteur », au sens culturel, de manière à faire comprendre à un employeur la valeur du profil professionnel d’un immigrant et à celui-ci les attentes d’un employeur québécois.

Il va sans dire que la pierre angulaire de l’attraction, de l’établissement et de la rétention des immigrants en région reste l’emploi. Souvent, pour le choix du lieu de résidence, le taux de chômage plus bas est un indicateur qui pèse lourd dans la balance, car il est le gage, aux yeux des nouveaux arrivants, des « probabilités » de leur accès rapide à un travail. Pour ma part, cela me semble réducteur et aucunement significatif, car l’activité économique reste quand même présente, malgré un taux de chômage relativement élevé, car les besoins sont là, manifestes, surtout pour la région de la Mauricie qui devra demain, pour ne pas dire dès aujourd’hui, recruter de la relève en raison d’une population vieillissante. Il est vrai que cela sous-tend la mise en candidature de beaucoup de compétiteurs pour un même poste. Dans ce contexte, tout se joue dans la sélection « du » candidat par l’entreprise. C’est alors que notre travail requiert de rendre compétitif l’immigrant présenté par Stratégie Carrière, de lui faire gagner des places dans la pile de curriculum vitae sur le bureau des recruteurs, en mettant de l’avant les compétence de notre candidat pour éviter son éviction à cause de l’orthographe de son nom ou du pays d’origine où a été dispensée sa formation et exercée son activité professionnelle.

Parallèlement à ce travail auprès de nos clients, il convient de faire une campagne permanente de sensibilisation et d’information auprès des employeurs, car l’immigration est encore un phénomène nouveau en Mauricie et les « idées reçus » ont la vie dure. Par contre, l’économie est souvent un vecteur de progrès, d’évolution et d’ouverture d’esprit. De plus, le spectre de la relève urgente à dénicher et de ses conséquences socio-économiques impose d’ores et déjà une réflexion aux recruteurs pour le développement de leur industrie. Cette conjoncture est alors propice à l’alternative qui est l’embauche d’immigrants dans notre région.

Un parcours vers l’emploi


Monsieur B. est originaire d’Afrique et a fait ses études de mécanicien de machines fixes en Belgique. Il a quatre années d’expérience professionnelle en tant qu’officier mécanicien de la marine marchande. Il est arrivé au Québec en janvier 2006 avec sa conjointe.

Dès son arrivée, il a entamé sa recherche d’emploi et après quatre mois de recherches infructueuses, il a orienté son projet professionnel vers la reprise d’une formation universitaire en génie mécanique pensant que celle-ci lui donnerait plus de reconnaissance auprès des employeurs et ne l’éloignerait pas de son domaine. Les cours ne débutant qu’au mois de septembre, il est retourné en Belgique pour un contrat sur un navire.

Fin octobre 2006, Monsieur B. intègre notre programme car l’emploi reste sa priorité pour des raisons financières. Les premières rencontres avec la conseillère ont permis de mettre à jour les outils de recherche d’emploi et finaliser les démarches pour l’obtention de cartes de compétences professionnelles. Une fois le processus de mise en mouvement entamé, l’agent de liaison s’est associé au dispositif en apportant une dimension « entreprise » à la recherche. En collaboration avec le client, des entreprises sont ciblées, des offres sont relevées et un positionnement du client est réalisé par l’agent de liaison afin de faciliter la mise en relation avec les employeurs. Rapidement Monsieur B a une proposition d’emploi mais malheureusement, les compétences transférables du client sont insuffisantes et l’employeur n’est pas en capacité d’assurer la mise à niveau du client.

Cette courte période en emploi a été profitable dans le sens où elle a permis d’orienter différemment les secteurs d’activité à solliciter. De nouveaux contacts sont pris par l’agent de liaison et le CV du client est adressé à des entreprises ciblées. En février un nouveau maillage est réalisé, il s’ensuit une entrevue à l’entreprise. Le profil convient à celui recherché et une proposition d’emploi est faite. Malheureusement une semaine avant le début d’emploi, le client doit retourner en Belgique à cause de problèmes familiaux pour une durée de 2 mois. L’agent de liaison entame alors une médiation avec l’employeur qui consent à attendre le retour du client. Monsieur B. est en emploi depuis le 3 mai dernier. Le suivi réalisé après un mois auprès du client et de l’employeur démontre jusqu’alors une bonne intégration.



Cet article est paru dans l'édition Été 2007 du Jumelé

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